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Page:Œuvres de Blaise Pascal, V.djvu/222

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206 ŒUVRES

suffît pour ne point mentir, 1 de dire simplement qu’ils n’ont point fait ce qu’ils ont fait, pourveu qu’ils ayent en general l’intention de donner à leurs discours le sens qu’un habile homme y donneroit.

Dites la verité : Il vous est arrivé bien des fois d’estre embarassé manque de cette connoissance ? Quelquefois, luy dis-je. Et n’avoüerez-vous pas de mesme 1 qu’il seroit souvent bien commode d’estre dispensé en conscience de tenir de certaines paroles qu’on donne ? Ce seroit, luy dis-je, mon Pere, la plus grande commodité du monde ! Escoutez donc Escobar au tr. 3. ex. 3. n. 48 3. où il donne cette regle generale. Les promesses n’obligent point, quand on n’a point intention de s’obliger en les faisant. Or il n’arrive guere qu’on ait cette intention, à moins que l’on les confirme par serment, ou par contract ; de sorte que quand on dit simplement, je le feray, on entend qu’on le fera si l’on ne change de volonté. Car on ne veut pas se priver par là de sa liberté. Il en donne d’autres que vous y pouvez voir vous mesme ; et il dit à la fin, que tout cela est pris de Molina, et de nos autres auteurs ; omnia ex Molina, et aliis ; et ainsi on n’en peut pas douter.

O mon Pere, luy dis-je, je ne sçavois pas que la direction d’intention eust la force de rendre les promesses nulles ! Vous voyez, dit le Pere, que voilà une grande facilité pour le commerce du monde.

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1. P. de, manque.

2. B. [continua-t-il,].

3. Cf. ce texte d’Escobar, supra p.186.