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ŒUVRES

sommes-nous, mes Peres ? Sont-ce des Religieux et des Prestres qui parlent de cette sorte ? Sont-ce des Chrestiens ? Sont-ce des Turcs ? Sont-ce des hommes ? Sont-ce des demons ? [1] Et sont-ce là des mysteres revelez par l’Agneau à ceux de sa Societé[2], ou des abominations suggerées par le Dragon à ceux qui suivent son party.

Car enfin, mes Peres, pour qui voulez-vous qu’on vous prenne ; pour des enfans de l’Evangile, ou pour des ennemis de l’Evangile ? On ne peut estre que d’un party ou de l’autre ; il n’y a point de milieu. Qui n’est point avec Jesus-Christ, est contre luy[3]. Ces deux genres d’hommes partagent tous les hommes. Il y a deux peuples et deux mondes répandus sur toute la terre, selon S. Augustin[4] : le monde des enfans de Dieu, qui forme un corps dont Jesus-Christ est le Chef et le Roy ; et le monde ennemy de Dieu, dont le diable est le chef et le Roy. Et c’est pourquoy Jesus-Christ est appellé le Roy et le Dieu du monde[5] ; parce qu’il a partout des sujets et des adorateurs : et [6]le diable

  1. Cf. une gradation analogue dans la Lettre d’Arnauld à un duc et pair, citée infra p. 246.
  2. Citation tirée de la préface d’Escobar, cf. supra T. IV, p. 287.
  3. Matth. XII, 30 : Qui non est mecum, contra me est.
  4. Enarratio in Psalmum 141, n. 15 : Audi mundum et mundum aperte, uno loco in Scriptura Sancta, in Evangelio ; mundum quem fecit Deus, mundum quem regit diabolus, id est dilectores mundi. Homines enim ipsos fecit Deus, dilectores mundi non eos fecit.
  5. Joan. XII, 31 : nunc princeps hujus mundi ejicietur foras. — Paul. II Cor. IV, 4 : Deus hujus sœculi. — Joan. XVI, 11 : princeps hujus mundi.
  6. B. [que] le diable.