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TREIZIÈME PROVINCIALE 35

si vous avez renversé la loy de Dieu qui defend l’homicide. Il n’est pas question de sçavoir si vous avez blessé l’Estat, mais la religion. A quoy sert-il donc dans ce genre de dispute de monstrer que vous avez épargné l’Estat, quand vous faites voir en mesme temps que vous avez destruit la Religion, en disant comme vous faites p. 28. l. 3¹. Que le sens de Reginaldus sur la question de tuer pour des médisances, est qu’un particulier a droit d’user de cette sorte de defense, la considerant simplement en elle-mesme ? Je n’en veux pas davantage que cét aveü pour ²vous confondre. Un particulier, dites-vous, a droit d’user de cette defense, c’est à dire de tuer pour des médisances, en considerant la chose en elle-mesme. Et par consequent, mes Peres, la loy de Dieu qui defend de tuer est ruïnée par cette decision.

Et il ne sert de rien de dire ensuite comme vous faites, que cela est illegitime et criminel, mesme selon la Loy de Dieu, à raison des meurtres et des desordres qui en arriveroient dans l’Estat, ³et qu’on est obligé selon Dieu d’avoir égard au bien de l’Estat C’est sortir de la question. Car, mes Peres, il y a deux loix à observer : l’une qui défend de tuer ; l’autre qui défend de nuire à l’Estat. Reginaldus n’a pas peut estre violé la loy qui défend de nuire à l’Estat ; mais il a violé certainement celle qui défend de tuer. Or il ne s’agit icy que de celle-là seule. Outre que

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1. Cf. la quinzième Imposture, supra p. 9.

2. P. vous, manque.

3. B. [parce] qu’on.