Page:Œuvres de Blaise Pascal, VII.djvu/42

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28 ŒUVRES

Je vous déclare donc, mon Père, que vous n'avez plus rien à reprendre en vos adversaires, parcequ ils détestent assurément ce que vous détestez. Je suis seulement estonné de voir que vous l'ignoriez, et que vous ayez si peu de connoissance de leurs sen- timens sur ce sujet, qu'ils ont tant de fois déclarez dans leurs ouvrages. Je m'assure que si vous en es- tiez mieux informé vous auriez du regret de ne vous estre pas instruit avec un esprit de paix d'une doc- trine si pure et si chrestienne, que la passion vous fait combattre sans la connoistre. Vous verriez, mon Père, que non seulement ils tiennent qu'on résiste efPectivement^ à ces grâces foibles, qu'on appelle ex- citantes, ou inefficaces, en n'exécutant pas le bien qu'elles nous inspirent : mais qu'ils sont encore aussi fermes à soutenir contre Calvin le pouvoir que la volonté a de résister mesme à la grâce efficace et victorieuse, qu'à delTendre contre Molina le pouvoir de cette grâce sur la volonté ; aussi jaloux de l'une de ces veritez, que de l'autre. Ils ne sçavent que trop que l'homme par sa propre nature a toujours le pouvoir de pécher et de résister à la grâce, et que depuis sa corruption il porte un fond malheureux de concupiscence^ qui luy augmente infiniment ce pouvoir ; mais que néanmoins quand il plaist à Dieu de le toucher par sa miséricorde, il luy fait faire ce qu'il veut, et en la manière qu'il le veut, sans que

��I, W. acta ac reipsa.

1. Le « Jîgmentum mahim » dont Pascal parle dans les Pensées, fr. 453, T. Il, p. 366.

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