ne voulait entrer que le second.
Pour arranger la chose, ils entrèrent tous deux ensemble, s’entrechoquant comme deux gourdes qu’on porte au bout d’un bâton.
Le sergent et le caniche, dont l’intrusion fit gronder la chatte comme une tigresse royale, tenaient l’arrière garde.
— Ma chère sœur, dit Benjamin, j’ai l’honneur de vous présenter un élève en chirurgie et un…
— Benjamin s’apprête à te dire des bêtises, interrompit mon grand-père, ne l’écoute pas, monsieur est un soldat qu’on nous envoie en logement, et que nous avons rencontré à la porte.
Ma grand’mère était bonne femme, mais un peu harpie ; elle croyait que de crier bien fort ça la grandissait. Elle avait la meilleure envie du monde de se mettre en colère, et elle en avait d’autant plus envie qu’elle en avait le droit.
Mais elle se piquait de savoir-vivre, attendu qu’elle descendait d’un robin ; la présence d’un étranger la contint.
Elle offrit à souper au sergent. Celui-ci ayant refusé, et pour cause, elle le fit conduire par un de ses enfants au cabaret voisin, avec recommandation de lui donner à déjeuner le lendemain avant qu’il se remît en route.
Mon grand-père pliait toujours comme un jonc, le brave homme paisible qu’il était, quand s’élevait une bourrasque conjugale. Ce qui peut, jusqu’à un certain point, excuser en lui cette faiblesse, c’est qu’il avait toujours tort.
Il avait bien vu l’orage s’amasser sur le front plissé de sa femme ; aussi le sergent était encore sur le seuil de la porte, que déjà il avait gagné son lit, où il s’introduisit de son mieux. Pour Benjamin, il était incapable d’une telle lâcheté. Un sermon en cinq points, comme une partie d’écarté, ne l’eût pas fait coucher une minute avant son heure. Il voulait bien que sa sœur le grondât, mais il ne consentait pas à la craindre. Il attendait la tempête qui