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Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/308

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L’officier fit encore quelques tours dans le salon, et se plaçant de nouveau en face de mon oncle :

— Je vous prie, monsieur, lui dit-il, d’interrompre un moment le cours de votre lecture, j’aurais un mot à vous dire.

— Puisque ce n’est qu’un mot, dit mon oncle, faisant un pli à la feuille qu’il lisait, je puis bien perdre un moment à vous entendre.

M. de Pont-Cassé était exaspéré du sang-froid de Benjamin.

— Je vous déclare, lui dit-il, monsieur Rathery, que si vous ne sortez à l’instant même par cette porte, je vais vous faire sortir, moi, par cette fenêtre.

— Vraiment, fit mon oncle ; eh bien ! moi ! monsieur, je serai plus poli que vous, je vais vous faire sortir par cette porte. Et, prenant l’officier par le milieu du corps, il le porta sur le palier et ferma derrière lui la porte à double tour.

Comme Mlle Minxit tremblait :

— Ne vous effrayez pas trop de moi, lui dit mon oncle ; l’acte de violence que je me suis permis envers cet homme était surabondamment justifié par une longue série d’insultes. Et, d’ailleurs, ajouta-t-il avec amertume, je ne vous embarrasserai pas longtemps de ma longue personne ; je ne suis pas de ces épouseurs de dot qui prennent une femme au bras de celui qu’elle aime et l’attachent brutalement au pied de leur lit. Toute jeune fille a reçu du ciel son trésor d’amour ; il est juste qu’elle choisisse l’homme avec lequel il lui plaît de le dépenser ; nul n’a le droit d’épancher sur le chemin et de fouler sous ses pieds les blanches perles de sa jeunesse. À Dieu ne plaise qu’un vil appétit d’argent me fasse commettre une mauvaise action ! Jusqu’ici j’ai vécu pauvre, je sais les joies de la pauvreté et j’ignore les misères de la richesse ; en échangeant ma folle et rieuse indigence contre une