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Page:Œuvres de C. Tillier - III.djvu/55

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SUR LA RÉFORME ÉLECTORALE.

vous semblent-elles pas une monnaie suffisante pour payer votre tête de roi ? Et ces quatorze armées tombées l’une après l’autre sur la frontière en défendant le sol de la République contre une ligue de sept rois, ne les compterez vous-pas ? Et ces généreux soldats qui allaient sans souliers à l’ennemi, qui combattaient sans avoir mangé, qui passaient des saisons entières au bivouac, n’ont-ils pas eu aussi leurs misères avant le repos du champ de bataille ? Non, vous avez beau dire, nous ne renierons pas nos pères ; nous déplorerons leurs excès, comme un accident inséparable de leur position, si vous le voulez, comme un crime de la nécessité, mais nous honorerons toujours leurs sauvages et inflexibles vertus. Et vous qui venez faire vos ordures sur leurs cendres, que seriez-vous sans eux ? Les valets de chambre de ces grands seigneurs, dont vous avez pris la place. Si donc, des prétendus crimes du peuple, vous tirez des conclusions sinistres contre le gouvernement populaire ; des crimes des rois, de celui du moins de Charles X, nous tirerons les mêmes conclusions contre la royauté. Il nous est permis comme à vous de mai raisonner.

Une fois pour toutes, finissons-en avec 93. Laissez dormir la grande époque sous son linceul ensanglanté ; mangez, dansez, faites de honteux traités sur sa tombe, le terrible siècle ne se réveillera plus ! Ce n’est pas nous, esprits sceptiques, âmes lavées par une émulsive civilisation, que les passions politiques, comme des chevaux indomptés qui galopent dans le sang, emporteront à travers les excès d’une révolution. La faiblesse, plutôt qu’une exubérante énergie est le vice de notre époque. Voyez comme on se dégoûte des affaires ! L’événement le plus grave tombe à la surface de cet océan d’hommes, comme un grain de sable qui y fait à peine une ride. Chacun se fait une patrie de sa famille, une France de son comptoir, et dans toutes les opinions se trouvent des hommes qui se font une enseigne de leur drapeau. L’égoïsme, comme une croûte de pierre, monte et monte sans cesse autour des cœurs. On mesure sa haine et son affection au gouvernement, d’a-