Page:Œuvres de Catulle, Tibulle et Properce, trad de Guerle, Valatour et Guenouille, 1860.djvu/181

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race humaine les meurtres et les combats ; c'est lui qui ouvrit à la cruelle mort une route plus courte.

Mais non, l'infortuné n'est pas coupable : nous avons fait servir à notre perte les armes qu'il nous avait mises en main pour combattre les animaux féroces.

C'est la faute de l'or ; la guerre n'existait point, quand on n'avait sur sa table qu'une coupe de hêtre. Point de forteresses, point de remparts : le berger goûtait un sommeil paisible au milieu de ses brebis. Que n'ai-je vécu alors ? je n'eusse point connu les luttes sanglantes où se plaît le vulgaire ; je n'aurais point senti mon coeur palpiter aux accents de la trompette. Maintenant on m'entraîne à la guerre, et déjà peut-être quelque ennemi porte le trait qui doit rester dans mon flanc. Veillez sur moi, Lares de mes pères ; c'est vous qui m'avez nourri lorsque enfant je courais à vos pieds. Ne rougissez pas d'être formés d'un vieux bois : c'est ainsi que vous habitiez la demeure de mes aïeux. L'homme était plus religieux observateur de sa foi quand, honorés sans luxe, les dieux n'avaient, dans une étroite chapelle, qu'une image en bois. Il suffisait, pour les apaiser, de leur offrir une grappe de raisin, de ceindre leur chevelure sacrée d'une couronne d'épis. Celui dont le voeu avait été exaucé leur portait des gâteaux ; sa fille, encore toute petite, l'accompagnait avec un rayon de miel.