Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/276

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assez fortes et convaincantes. Quand je dis qu’il me semble que cela m’est enseigné par la nature, j’entends seulement par ce mot de nature une certaine inclination qui me porte à le croire, et non pas une lumière naturelle qui me fasse connoître que cela est véritable. Or ces deux façons de parler diffèrent beaucoup entre elles. Car je ne saurois rien révoquer en doute de ce que la lumière naturelle me fait voir être vrai, ainsi qu’elle m’a tantôt fait voir que de ce que je doutois je pouvois conclure que j’étois ; d’autant que je n’ai en moi aucune autre faculté ou puissance pour distinguer le vrai d’avec le faux, qui me puisse enseigner que ce que cette lumière me montre comme vrai ne l’est pas, et à qui je me puisse tant fier qu’à elle. Mais pour ce qui est des inclinations qui me semblent aussi m’être naturelles, j’ai souvent remarqué, lorsqu’il a été question de faire choix entre les vertus et les vices, qu’elles ne m’ont pas moins porté au mal qu’au bien ; c’est pourquoi je n’ai pas sujet de les suivre non plus en ce qui regarde le vrai et le faux. Et pour l’autre raison, qui est que ces idées doivent venir d’ailleurs, puisqu’elles ne dépendent pas de ma volonté, je ne la trouve non plus convaincante. Car tout de même que ces inclinations dont je parlois tout maintenant se trouvent en moi, nonobstant qu’elles ne s’accordent pas toujours avec ma volonté, ainsi peut-être