Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/326

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pense plus aux raisons pour lesquelles j’ai jugé cela être véritable, pourvu seulement que je me ressouvienne de l’avoir clairement et distinctement compris, on ne me peut apporter aucune raison contraire qui me le fasse jamais révoquer en doute ; et ainsi j’en ai une vraie et certaine science. Et cette même science s’étend aussi à toutes les autres choses que je me ressouviens d’avoir autrefois démontrées, comme aux vérités de la géométrie, et autres semblables : car qu’est-ce que l’on me peut objecter pour m’obliger à les révoquer en doute ? Sera-ce que ma nature est telle que je suis fort sujet à me méprendre ? Mais je sais déjà que je ne puis me tromper dans les jugements dont je connois clairement les raisons. Sera-ce que j’ai estimé autrefois beaucoup de choses pour vraies et pour certaines, que j’ai reconnues par après être fausses ? Mais je n’avois connu clairement ni distinctement aucunes de ces choses-là, et ne sachant point encore cette règle par laquelle je m’assure de la vérité, j’avois été porté à les croire, par des raisons que j’ai reconnues depuis être moins fortes que je ne me les étois pour lors imaginées. Que me pourra-t-on donc objecter davantage ? Sera-ce que peut-être je dors (comme je me l’étois moi-même objecté ci-devant), ou bien que toutes les pensées que j’ai maintenant ne sont pas plus vraies que les rêveries que nous imaginons étant endormis ? Mais,