Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/345

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me porter vers celles qui me font avoir quelque sentiment de plaisir ; mais je ne vois point qu’outre cela elle m’apprenne que de ces diverses perceptions des sens, nous devions jamais rien conclure touchant les choses qui sont hors de nous, sans que l’esprit les ait soigneusement et mûrement examinées ; car c’est, ce me semble, à l’esprit seul, et non point au composé de l’esprit et du corps, qu’il appartient de connoître la vérité de ces choses-là. Ainsi, quoiqu’une étoile ne fasse pas plus d’impression en mon œil que le feu d’une chandelle, il n’y a toutefois en moi aucune faculté réelle ou naturelle qui me porte à croire qu’elle n’est pas plus grande que ce feu, mais je l’ai jugé ainsi dès mes premières années sans aucun raisonnable fondement. Et quoiqu’en approchant du feu je sente de la chaleur, et même que m’en approchant un peu trop près je ressente de la douleur, il n’y a toutefois aucune raison qui me puisse persuader qu’il y a dans le feu quelque chose de semblable à cette chaleur, non plus qu’à cette douleur ; mais seulement j’ai raison de croire qu’il y a quelque chose en lui, quelle qu’elle puisse être, qui excite en moi ces sentiments de chaleur ou de douleur. De même aussi, quoiqu’il y ait des espaces dans lesquels je ne trouve rien qui excite et meuve mes sens, je ne dois pas conclure pour cela que ces espaces ne contiennent en eux aucun corps ; mais