Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/471

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais nous concevons clairement l’esprit, c’est-à-dire une substance qui pense, sans le corps, c’est-à-dire sans une substance étendue, par la demande ii ; et d’autre part nous concevons aussi clairement le corps sans l’esprit, ainsi que chacun accorde facilement :

Donc au moins, par la toute-puissance de Dieu, l’esprit peut être sans le corps, et le corps sans l’esprit.

Maintenant les substances qui peuvent être l’une sans l’autre sont réellement distinctes, par la définition x ;

Or est-il que l’esprit et le corps sont des substances, par les définitions v, vi et vii, qui peuvent être l’une sans l’autre, comme je le viens de prouver :

Donc l’esprit et le corps sont réellement distincts.

Et il faut remarquer que je me suis ici servi de la toute-puissance de Dieu pour en tirer ma preuve ; non qu’il soit besoin de quelque puissance extraordinaire pour séparer l’esprit d’avec le corps, mais pourceque, n’ayant traité que de Dieu seul dans les propositions précédentes, je ne la pouvois tirer d’ailleurs que de lui. Et il importe fort peu par quelle puissance deux choses soient séparées, pour connoître qu’elles soient réellement distinctes.