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Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome II.djvu/23

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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

sitive, et ici notre auteur confond le jugement avec l’idée. Car qu’est-ce que l’idée du froid ? C’est le froid même, en tant qu’il est objectivement dans l’entendement : mais si le froid est une privation, il ne sauroit être objectivement dans l’entendement par une idée de qui l’être objectif soit un être positif ; donc, si le froid est seulement une privation, jamais l’idée n’en pourra être positive, et conséquemment il n’y en pourra avoir aucune qui soit matériellement fausse.

Cela se confirme par le même argument que M. Descartes emploie pour prouver que l’idée d’un Être infini est nécessairement vraie : car, dit-il, bien que l’on puisse feindre qu’un tel être n’existe point, on ne peut pas néanmoins feindre que son idée ne me représente rien de réel.

La même chose se peut dire de toute idée positive ; car, encore que l’on puisse feindre que le froid, que je pense être représenté par une idée positive, ne soit pas une chose positive, on ne peut pas néanmoins feindre qu’une idée positive ne me représente rien de réel et de positif, vu que les idées ne sont pas appelées positives selon l’être qu’elles ont en qualité de modes ou de manières de penser, car en ce sens elles seroient toutes positives ; mais elles sont ainsi appelées de l’être objectif qu’elles contiennent et représentent à notre esprit. Partant cette idée peut bien n’être