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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

j’ai toujours fait la même distinction : car dès le commencement, où j’ai dit[1] « qu’il n’y a aucune chose dont on ne puisse rechercher la cause efficiente, » j’ai ajouté, « ou, si elle n’en a point, demander pourquoi elle n’en a pas besoin ; » lesquelles paroles témoignent assez que j’ai pensé que quelque chose existoit qui n’a pas besoin de cause efficiente. Or quelle chose peut être telle, excepté Dieu ? Et même un peu après j’ai dit « qu’il y avoit en Dieu une si grande et si inépuisable puissance, qu’il n’a jamais eu besoin d’aucun secours pour exister et qu’il n’en a pas encore besoin pour être conservé, en telle sorte qu’il est en quelque façon la cause de soi-même. » Là où ces paroles, la cause de soi-même, ne peuvent en façon quelconque être entendues de la cause efficiente, mais seulement que cette puissance inépuisable qui est en Dieu, est la cause ou la raison pour laquelle il n’a pas besoin de cause. Et d’autant que cette puissance inépuisable ou cette immensité d’essence est très positive, pour cela j’ai dit que la cause ou la raison pour laquelle Dieu n’a pas besoin de cause, est positive. Ce qui ne se pourroit dire en même façon d’aucune chose finie, encore qu’elle fût très parfaite en son genre. Car si on disoit qu’une chose finie fût par soi, cela ne pourroit être entendu que d’une façon négative, d’autant qu’il seroit im-

  1. Réponses aux premières objections, tome I, page 371.