Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reconnue par des plus habiles. Et nous aussi nous nous félicitons d’avoir reçu autrefois l’éducation de l’école ; mais comme maintenant nous sommes déliés du serment qui nous enchaînoit aux paroles du maître, et que, notre âge étant devenu assez mûr, nous avons soustrait notre main aux coups de la férule, si nous voulons sérieusement nous proposer des règles, à l’aide desquelles nous puis­sions parvenir au faîte de la connoissance humaine, mettons au premier rang celle que nous venons d’énoncer, et gardons-nous d’abuser de notre loi­sir, négligeant, comme font beaucoup de gens, les études aisées, et ne nous appliquant qu’aux choses difficiles. Ils pourront, il est vrai, former sur ces choses des conjectures subtiles et des systèmes probables ; mais, après beaucoup de travaux, ils fini­ront par s’apercevoir qu’ils ont augmenté la somme des doutes, sans avoir appris aucune science.

Mais comme nous avons dit plus haut que, par­mi les sciences faites, il n’existe que l’arithmétique et la géométrie qui soient entièrement exemptes de fausseté ou d’incertitude, pour en donner la raison exacte, remarquons que nous arrivons à la connoissance des choses par deux voies, c’est à sa­voir, l’expérience et la déduction. De plus, l’expé­rience est souvent trompeuse ; la déduction, au con­traire, ou l’opération par laquelle on infère une chose d’une autre, peut ne pas se faire, si on ne