néant des choses et des êtres est mêlé d’un burlesque soudain qui en augmente l’effet. Et tout cela est si naturel, si net, si franc, si spirituel ; le style suit la pensée avec une justesse si vive, que vous n’avez pas le temps d’admirer comment le corps qu’il revêt est habillé par le vêtement… Il a tout, la vigueur et le charme, la clarté et l’éclat, la variété et l’unité, la gravité et l’esprit, la brièveté incisive du trait et la plénitude du sens, la souplesse capricieuse et la fougue violente, la qualité contemporaine et l’éternelle humanité. Il faut aller jusqu’à Rabelais pour trouver un maître qu’on puisse lui comparer, et qui écrive le français avec la science et l’instinct, avec la pureté et la fantaisie, avec la grâce délicate et la rudesse souveraine que l’on admire dans Villon et qu’il a seul parmi les gens de son temps[1]… » Ce jugement de Montaiglon, émis en 1875, était pleinement confirmé vingt ans après par Paul Meyer qui estime que « les quelques pages qu’il a consacrées à Villon dans cet ouvrage (le 1er vol. des Poètes français de Crépet) restent encore maintenant (21 septembre 1895) ce qui a été écrit déplus judicieux sur le poète le plus original du xve siècle[2]. »
Il ne semble pas nécessaire de poursuivre ces citations qu’on trouvera du reste réunies ailleurs[3]. L’examen des appréciations portées sur Villon et son œuvre depuis l’origine jusqu’à nos jours, en France et à l’étranger, exigerait
- ↑ Eug. Crépet, Les poètes français (publiés sous la direction de), Paris, 1861, in-8o, t. I, p. 453.
- ↑ Discours de Paul Meyer prononcé sur la tombe d’Anatole de Montaiglon, p. 3 ; tirage à part de la Bibliothèque de l’École des Chartes, t. LVI (1895), p. 593.
- ↑ Cf. Ulysse Chevalier, Répertoire bibliographique, au mot Villon ; Catalogues de la Bibl. nationale ; Longnon, 2me édit. des Œuvres de Villon (1911), Introduction, p. viii-xiii ; etc.