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74 FRANÇOIS VILLON

« J'ai entendu, dit-il, quelques-uns des plus grands pécheurs du monde; eh bien! si grand qu'ait été le pécheur qui m'ait prié de l'entendre, je l'ai toujours aimé cent fois plus après l'avoir confessé qu'avant ' ! »

Dans le relâchement à peu près général des mœurs publiques, au quinzième siècle, le sentiment de l'hon- neur était presque partout absent. Certes, rien n'était plus commun que le mot ; en réalité, rien de plus rare que la chose. Chez les gens de guerre, le vol, le viol, l'écrasement des petits, le pillage et le meurtre étaient de règle. Ils n'en jouissaient pas moins de la faveur du souve- rain et occupaient souvent les plus hautes fonctions mili-

I. Hauréau, Les propos de maistre Robert deSorhov, dans les Mémoires de l'Académie des Ins. et B. -Lettres, 1884, 2me partie, p. 178. Cet aveu est pleinement confirmé par l'exemple suivant emprunté à la Diète du Salut de Pierre de « Lucembourg » : « Ung riche homme, père du curé de la ville, dist villeniea ungpouvre homme. Et alors le pouvre homme ne se peut venger, ainczois actendit que le riche homme alla une foiz tout seul veoir ses blez es champs. Le pouvre homme qui point n'avoit obliee la villenie qui faicte luv avoit esté, tantost qu'il le vit venir, prist le coultre de sa charrue et en tua le riche homme. Puis s'en alla mener sa charrue ; et ne sceuton que ce avoit fait. Apres,quant ung espace de temps fut passé, il advint que ce pouvre homme repentant de son péché s'en alla a confesse a son curé qui estoit filz dudit riche homme qui estoit occis. Et ainsi qu'il le confessoit, le curé perceut qu'il avoit aucun péché en sa conscience qu'il n'osoit dire ne confesser. Et luy dit : « Mon amy, dy hardiement tous tes péchez. Car il n'en est nul si grant que Dieu ne puisse pardonner, puis que on luy en crie mercy. Et aussy de tout ce que je y trouveray, je te ayderay et pardonneray. » Adonc dist le pouvre homme : « A sire, je suis le mauvays homme qui tua vostre père ; ainsy et par telle manière, et pour telle cause. Si m'en confesse a Dieu et a vous. Et vous prie de ce meffait le pardon, et en requière absolu- cion. » Adonc le prestre mua le sang pour nature ; mais point ne fîst de semblant, et pardonna au pouvre homme de bon amour la mort de son père. Et depuis le curé monstra au pouvre homme plus grant chiere et signe d'amour que par avant. » Fr. 1856, fol. 5 vo-6.

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