Page:Œuvres de François Villon Thuasne 1923.djvu/99

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forme sérieuse et grave, philosophique et humaine, c’est à lui-même que Villon la doit : il l’a prise dans son propre cœur et dans les replis intimes de son être souffrant et pensant ; aussi cette création unique est-elle au premier chef

En l’air, pour doubte de perir ;
Talent n’avoie de mourir.
Je commenday a Dieu le Pere,
A Jesucrit et a sa mere
Mon ame, qu’il la voulsist prandre
Et en son saint paradis rendre.
Je laisse cent soulz de deniers
Aceulz qui boivent voluntiers ;
Et s’ay lessié a mon curé
Ma pucelle, quant je mourré.
J’ay laissié a son chapellain
Un chaperon et mon villain.
Toute la penne et le drap hors ;
Et s’ay voulu que tous mes tors
Soient tenuz comme bien fais.
Item j’ay fait un autre lais
Qu’om croie mes hoirs de mes debtes
Et les paies qui en sont fectes.
Je lesse aux Ordres mendians
Mon grant escrin ou il n’a riens,
Excepté le bois et le fer,
Car ilz gettent les gens d’enfer
Et font aller au purgatoire
Des leur vivant qui les veult croire.
Item, je lesse a l’Ordre grise
Ma viez braie et ma viez chemise,
Et a l’Ordre de Premontré
L’esbatement dedanz mon pré
Puisque l’erbe en sera ostee.
Et s’ay laissié une donnee
A chacun povre qui vendra :
S’il a un franc, on lui rendra
Xvi soulz de bons parisis ;
Et s’ay laissié en Cambresis