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Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome premier, 1750.djvu/99

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Je voudrais avec toi le rejoindre moi-même ;
Mais je crains les tranſports de ſa douleur extrême :
Je me ſens pénétré de ſes tendres regrets,
Et ne puis, ſans mourir, voir ces triſtes objets.


SCÈNE II.
IDAMANTE, ſeul.

Enfin, loin des témoins dont l’aſpect m’importune,
Je puis en liberté plaindre mon infortune ;
Et mon cœur, déchiré des plus cruels tourments,
Peut donc jouir en paix de ſes derniers moments !
Ciel ! Quel eſt mon malheur ! Quelle rigueur extrême !
Quel ſort pour ennemis m’offre tout ce que j’aime !
Je trouve en même jour conjurés contre moi
Les implacables dieux, ma princeſſe, & mon roi.
Pardonnez, Dieux puiſſants, ſi je vous fais attendre ;
Je le retiendrai peu ce ſang qu’on va répandre :
Mon cœur de ſon deſtin n’eſt que trop éclairci.
Eſt-ce pour mes forfaits que vous tonnez ainſi,
Dieux cruels ?… que dis-tu, miſérable victime ?
Né d’un ſang criminel, te manque-t-il un crime ?
Qu’avaient fait plus que toi ces peuples malheureux
Que le ciel a couverts des maux les plus affreux ?