Page:Œuvres de Robespierre.djvu/228

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chose que de lâches assassinats, que des crimes solennels, commis, non par des individus, mais par des nations entières, avec des formes légales. Quelque cruelles, quelque extravagantes que soient ces lois, ne vous en étonnez plus. Elles sont l’ouvrage de quelques tyrans ; elles sont les chaînes dont ils accablent l’espèce humaine ; elles furent écrites avec du sang. « Il n’est point permis de mettre à mort un citoyen romain. » Telle était la loi que le peuple avait portée : mais Sylla vainquit, et dit : Tous ceux qui ont porté les armes contre moi sont dignes de mort. Octave et les compagnons de ses forfaits confirmèrent cette loi.

Sous Tibère, avoir loué Brutus fut un crime digne de mort. Caligula condamna à mort ceux qui étaient assez sacrilèges pour se déshabiller devant l’image de l’empereur. Quand la tyrannie eut inventé les crimes de lèse-majesté, qui étaient ou des actions indifférentes, ou des actions héroïques, qui eût osé penser qu’elles pouvaient mériter une peine plus douce que la mort, à moins de se rendre coupable lui-même de lèse-majesté ?

Quand le fanatisme, né de l’union monstrueuse de l’ignorance et du despotisme, inventa à son tour les crimes de lèse-majesté divine, quand il conçut, dans son délire, de venger Dieu lui-même, ne fallut-il pas qu’il lui offrit aussi du sang, et qu’il le mît au moins au niveau des monstres qui se disaient ses images ?

La peine de mort est nécessaire, disent les partisans de l’antique et barbare routine ; sans elle il n’est point de frein assez puissant pour le crime. Qui vous l’a dit ? Avez-vous calculé tous les ressorts par lesquels les lois pénales peuvent agir sur la sensibilité humaine ? Hélas ! avant la mort, combien de douleurs physiques et morales l’homme ne peut-il pas endurer !

Le désir de vivre cède à l’orgueil, la plus impérieuse de toutes les passions qui maîtrisent le cœur de l’homme ; la plus terrible de toutes les peines pour l’homme social, c’est