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XII
LA VIE DE SPINOZA

de ses mains, et s’attacher à l’étude comme il avait résolu. Ainsi rien ne l’arrêtant plus à Amsterdam, il en partit, s’alla loger chez un homme de sa connaissance qui demeurait sur la route qui mène d’Amsterdam à Auwerkerke. Il y passa le temps à étudier et à travailler à ses verres ; lorsqu’ils étaient polis, ses amis avaient soin de les envoyer prendre chez lui, de les vendre et de lui en faire tenir l’argent.

IL VA DEMEURER À RHYNSBURG, ENSUITE À VOORBURG ET ENFIN À LA HAYE.

En l’an 1664 Spinoza partit de ce lieu et se retira à Rhynsburg, proche de Leyde, où il passa l’hiver ; mais aussitôt après il en partit et alla demeurer à Voorburg, à une lieue de la Haye, comme il le témoigne lui-même dans sa trentième lettre écrite à Pierre Balling. Il y passa, comme j’en ai été informé, trois ou quatre ans, pendant quoi il se fit un grand nombre d’amis à la Haye, tous gens distingués par leur condition ou par les emplois qu’ils exerçaient dans le gouvernement ou à l’armée. Ils se trouvaient volontiers en sa compagnie, et prenaient beaucoup de plaisir à l’entendre discourir. Ce fut à leur prière qu’il s’établit enfin et se fixa à la Haye, où il demeura d’abord en pension sur le Veerkaay, chez la veuve Van Velden, dans la même maison où je suis logé pour le présent. La chambre où j’étudie, à l’extrémité de la maison sur le derrière, au second étage, est la même où il couchait et où il s’occupait à l’étude et à son travail. Il s’y faisait souvent apporter à manger et y passait des deux et trois jours sans voir personne. Mais s’étant aperçu qu’il dépensait un peu trop dans sa pension, il loua sur le Pavilioengragt, derrière ma maison, une chambre chez le sieur Henri Van der Spyck, dont nous avons souvent fait mention, où il prit soin lui-même de se fournir ce qui lui était nécessaire pour le boire et pour le manger, et où il vécut à sa fantaisie d’une manière fort retirée.

IL ÉTAIT FORT SOBRE ET FORT MÉNAGER.

Il est presque incroyable combien il a été sobre pendant ce temps-là et bon ménager. Ce n’est pas qu’il fût réduit à une si