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TRAITÉ

dans l’Écriture une foule de choses ne soient données comme réelles et qu’on croyait effectivement réelles, qui ne sont au fond que des représentations imaginaires, comme, par exemple, que Dieu (l’être en soi) soit descendu du ciel (Exode, chap. xix, vers. 28 ; Deutéronome, chap. v, vers. 28) ; que le mont Sinaï ait lancé de la fumée, parce que Dieu venait d’y descendre entouré de flammes ; ou enfin qu’Élie soit monté au ciel sur un char enflammé traîné par des chevaux de feu. Ce ne sont là que des représentations fantastiques appropriées aux opinions de ceux qui nous les ont racontées, lesquels en effet nous ont décrit les choses comme ils les avaient imaginées, c’est-à-dire comme réelles. Quiconque a l’esprit un peu élevé au-dessus du vulgaire sait parfaitement que Dieu n’a ni droite ni gauche, qu’il n’est pas en mouvement, ni en repos, ni situé en tel endroit, mais qu’il est absolument infini et qu’il contient toutes les perfections. On sait tout cela, je le répète, quand on règle ses jugements sur les perceptions de l’entendement pur, et non pas sur les impressions des sens et de l’imagination, comme fait le vulgaire, qui se représente un Dieu corporel entouré d’une pompe royale, assis sur un trône élevé, par delà les étoiles, au plus haut de la voûte céleste, sans que cette distance toutefois l’éloigne beaucoup de la terre. C’est à de pareilles opinions que sont appropriés une foule de récits de l’Écriture, que des philosophes ne peuvent par conséquent pas prendre à la lettre. Je conclus qu’il importe, pour se rendre compte des miracles et savoir comment ils se sont passés, de connaître le langage et les figures hébraïques ; et quiconque n’y fera pas une attention suffisante risquera de trouver dans l’Écriture plusieurs miracles que l’historien n’a jamais pensé à donner pour tels ; de façon qu’il ignorera, non seulement la véritable manière dont se sont passées les choses, mais la pensée même des auteurs sacrés. Je vais citer quelques exemples : Zacharie (chap. xiv, vers. 7), prédisant une guerre prochaine, s’exprime ainsi : « Il y