Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/265

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avec eux pour Jérusalem ? La preuve en est qu’on y donne le compte, non-seulement de ceux qui ont indiqué leur généalogie, mais aussi de ceux qui n’ont pu le faire. N’est-il pas également clair, par le verset 5 du chapitre VII de Néhémias, que l’auteur de ce livre n’a fait que transcrire cette épître d’Hezras ? Par conséquent, ceux qui donnent à ces passages une explication différente nient le vrai sens de l’Écriture ; que dis-je ? ils nient l’Écriture elle-même. Ridicule piété, qui, sous prétexte d’expliquer un passage de la Bible par d’autres passages, subordonne les endroits clairs à ceux qui sont obscurs, les parties vraies et saines à celles qui sont altérées et corrompues ! Loin de moi, toutefois, la pensée d’accuser de blasphème ceux qui expliquent l’Écriture de la sorte ; leurs intentions sont pures, et je sais que l’erreur est le partage inévitable de l’homme. Mais je reviens à mon sujet.

Outre les erreurs qu’il faut bien reconnaître dans les supputations de l’Épître de la généalogie, celles de Néhémias comme celles d’Hezras, il s’en rencontre encore plusieurs autres dans les noms mêmes des familles, dans les généalogies, dans les histoires, et aussi, je le crains fort, dans les prophéties. Du moins, je ne vois pas que celle de Jérémie, au chapitre XXII, touchant Jéchonias, et surtout les paroles du dernier verset de ce chapitre, aient aucun rapport avec l’histoire de Jéchonias, telle qu’on la trouve sur la fin du livre II des Rois, dans Jérémie, et au livre I des Paralipomènes (chap. III, vers. 17, 18, 19). Je ne vois pas non plus comment Jérémie peut dire de Tsidéchias, à qui on avait crevé les yeux après avoir égorgé ses fils en sa présence : Tu mourras en paix (voyez Jérémie, chap. XXXIV, vers. 5). Que s’il était permis d’interpréter les prophètes d’après l’événement, il faudrait ici, à ce qu’il semble, changer les noms, mettre Jéchonias à la place de Tsidéchias, et réciproquement. Mais j’aime mieux dire que ce point reste obscur, surtout quand je considère que, s’il y a ici quelque erreur, on ne peut l’imputer qu’à l’historien et non à l’altération du texte.