Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/192

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de la nature et y obéit et s’y accommode, autant que la nature des choses l’exige.


PROPOSITION V

La force et l’accroissement de telle ou telle passion et le degré où elle persévère dans l’existence ne se mesurent point par la puissance avec laquelle nous faisons effort pour persévérer dans l’existence, mais par le rapport de la puissance de telle ou telle cause extérieure avec notre puissance propre.

Démonstration : L’essence de telle ou telle passion ne se peut expliquer par notre essence seule (en vertu des Déf. 1 et 2, part. 3) ; en d’autres termes (en vertu de la Propos. 7, part. 3), la puissance de cette passion ne se peut mesurer par la puissance avec laquelle nous faisons effort pour persévérer dans notre être ; mais (comme on le montre dans la Propos. 16, part. 2) elle se doit nécessairement mesurer par le rapport de la puissance de telle ou telle cause extérieure avec notre puissance propre. C. Q. F. D.


PROPOSITION VI

La force d’une passion ou d’une affection peut surpasser les autres actions ou la puissance de l’homme, de façon que cette affection s’attache obstinément à lui.

Démonstration : La force et l’accroissement des passions et le degré où elles persévèrent dans l’existence se mesurent par le rapport de la puissance des causes extérieures avec la nôtre (par la Propos. précéd.), et par conséquent (en vertu de la Propos. 3, part 4) elles peuvent surpasser la puissance de l’homme, etc. C. Q. F. D.


PROPOSITION VII

Une passion ne peut être empêchée ou détruite que par une passion contraire et plus forte.

Démonstration : Une passion, en tant qu’elle se rapporte à l’âme, c’est une idée par laquelle l’âme affirme la force d’existence plus grande ou plus petite de son corps (en vertu de la Déf. gén. des passions qui se trouve à la fin de la partie 3). Lors donc que l’âme est agitée par quelque passion, le corps éprouve en même temps une affection qui augmente ou diminue sa puissance d’agir. Or cette affection du corps reçoit de sa cause (par la Propos. 5,