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LETTRES.

LETTRE IX[1].

RÉPONSE À LA PRÉCÉDENTE
À MONSIEUR B. DE SPINOZA,
HENRI OLDENBURG


Puisque vous paraissez m’accuser d’un excès de brièveté, je vais aujourd’hui me justifier par une prolixité excessive. Vous attendiez de moi, à ce que je vois, l’indication de celles d’entre vos opinions qui ont paru à vos lecteurs tendre au renversement de la piété. Je vais vous dire ce qui les a surtout embarrassés. Vous établissez, à ce qu’il me semble, une nécessité fatale de toutes les actions et de toutes choses. Or, à leur avis, si ce point est une fois accordé, toute loi, toute vertu, toute religion sont coupées à leur racine ; toutes les récompenses et toutes les punitions sont vaines. En effet, ce qui impose une contrainte ou une nécessité est toujours un motif légitime d’excuse, et il suit de là que pas un seul homme ne sera inexcusable devant Dieu. Si nos actions dépendent du fatum, si toutes choses sont poussées par la dure main du sort suivant une voie déterminée et inévitable, où est la coulpe ? où sont les peines ? qui déliera le nœud de cette difficulté ? Voilà certes ce qu’on ne peut dire aisément. Je désire ardemment, Monsieur, savoir comment vous pourriez aider à la solution du problème.

Vous avez bien voulu me donner des éclaircissements au sujet des trois propositions que j’avais marquées ; mais il reste encore plusieurs choses à expliquer. Premièrement, en quel sens prenez-vous pour synonymes

  1. La XXIIe des Opp. posth.