Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/237

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Comme ces arbrisseaux frêles et rabougris
Qui, dès le mois de mai, sont pleins de feuilles mortes,
Ils s’effeuillent au vent, et vont devant leurs portes
Se chauffer au soleil à côté de l’aïeul,
Et du jeune et du vieux, à coup sûr, le plus seul,
Le moins accompagné sur la route du monde,
Hélas ! c’est le jeune homme à tête brune ou blonde
Et non pas le vieillard sur qui l’âge a neigé ;
Celui dont le navire est le plus allégé
D’espérance et d’amour, lest divin dont on jette
Quelque chose à la mer chaque jour de tempête,
Ce n’est pas le vieillard, dont le triste vaisseau
Va bientôt échouer à l’écueil du tombeau.
L’univers décrépit devient paralytique,
La nature se meurt, et le spectre critique
Cherche en vain sous le ciel quelque chose à nier.
Qu’attends-tu donc, clairon du jugement dernier ?
Dis-moi, qu’attends-tu donc, archange à bouche ronde
Qui dois sonner là-haut la fanfare du monde ?
Toi, sablier du temps, que Dieu tient dans sa main,
Quand donc laisseras-tu tomber ton dernier grain ?