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Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/242

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Mes efforts étaient vains, et ma triste pensée,
Comme fait dans sa cage un captif impuissant,
Fouettait le mur d’airain de son aile brisée.

Je montai l’escalier d’un pas lourd et pesant,
Et quand s’ouvrit la porte, un torrent de lumière
M’inonda de splendeur, tel qu’un flot jaillissant.

Sur mon œil ébloui palpitait ma paupière
Comme une aile d’oiseau quand il va pour voler ;
On m’eût pris, à me voir, pour un homme de pierre.

Je demeurai longtemps sans pouvoir te parler,
Plongeant mes yeux ravis au fond de ta peinture
Qu’un rayon de soleil faisait étinceler.

Comme sur un balcon, une riche tenture
Pendait du haut du ciel, un beau ton d’outremer
Plus vif que nul saphir dans l’écrin de nature.

Quelques nuages chauds, sous les frissons de l’air,
Se crêpaient mollement et faisaient une frange,
Aussi blonde que l’or au manteau de l’éther.

Sur le sable éclatant, plus jaune que l’orange,
Les grands pins balançant leur large parasol
Avec l’ombre agitaient leur silhouette étrange.

Une grêle de fleurs jonchait partout le sol,
Et l’on eût dit, au bout de leurs tiges pliantes,
Des papillons peureux suspendus dans leur vol.

Sous leurs robes d’azur aux lignes ondoyantes,
Le ciel et l’horizon dans un baiser charmant,
Fondaient avec amour leurs lèvres souriantes.