Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/359

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Mon ombre, comme un grand nuage,
Obscurcit l’horizon vermeil.

Je cause avec l’étoile bleue
Et la comète à pâle queue ;
Dans la lune je fais mon nid ;
Je perche sur l’arc d’une sphère ;
D’un coup de mon aile légère,
Je fais le tour de l’infini.

VI

L’HOMME


Léviathan, je vais, malgré les deux cascades
Qui de tes noirs évents jaillissent en arcades ;
La mer qui se soulève à tes reniflements,
Et les glaces du pôle et tous les éléments,
Monté sur une barque entr’ouverte et disjointe,
T’enfoncer dans le flanc une mortelle pointe ;
Car il faut un peu d’huile à ma lampe le soir,
Quant le soleil s’éteint et qu’on n’y peut plus voir.
Béhémot, à genoux, que je pose la charge
Sur ta croupe arrondie et ton épaule large ;
Je ne suis pas ému de ton énormité ;
Je ferai de tes dents quelque hochet sculpté,
Et je te couperai tes immenses oreilles,
Avec leurs plis pendants, à des drapeaux pareilles
Pour en orner ma toque et gonfler mon chevet.
Oiseau Rock, prête-moi ta plume et ton duvet,
Mon plomb saura t’atteindre, et, l’aile fracassée,
Sans pouvoir achever la courbe commencée,
Des sommités du ciel, à mes pieds, sur le roc,
Tu tomberas tout droit, orgueilleux oiseau Rock.