Page:Œuvres de Vauvenargues (1857).djvu/214

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l60 DISCOURS SUR LE CARACTERE beaucoup écrit. Le duel est né de l’opiniou, très-naturelle, 1 ‘ qu'un homme ne souffrait ordinairement d’injures d’un autre homme, que par faiblesse; mais, parce que la force du corps pouvait donner aux âmes timides un avantage très- considérable sur les âmes fortes, pour mettre de Pégalité dans les combats, et leur donner d’ailleurs plus de décence, nos pères imaginèrent de se battre avec des armes plus meurtrières et plus égales que celles qu'ils tenaient de lm. nature, et il leur_parut qu'un combat, où l'on pourrait s’ar— racher la vie d’un seul coup, aurait certainement plus dz noblesse qu'u.ne vile lutte, où l’on n’aurait pu tout au pluî · que s’égratigner le visage, et s’arracher les cheveux avec lcî mains. Ainsi, ils se tlatterent d’avoir mis dans leurs usageî plus de hauteur et de bienséance que les Romains et leî Grecs, qui se battaient comme leurs esclaves. lls pensaien 1 quecelui qui ne se venge pas d’un affront n’a point dea cœur; ils ne faisaient pas attention que la nature, qui nouz inspire de nous venger, pouvait, en s'élevant encore plu .€> haut, et par une force encore plus grande, nous inspire r de pardonner; ils oubliaient que les hommes sont oblige 5 de sacrifier souvent leurs passions à. la raison. La natur· 45 disait bien, à. la vérité , aux âmes courageuses qu'il falla.î· `|· se venger; mais elle ne leur disait pas qu'il fallut toujour-’ =’• laver les moindres oifenses dans le sang humain, on portî l' leur vengeance au delà meme de leur ressentiment. Mais :.1*.- C que la nature ne leur disait point, l'opinion le leur persuadgtï; ` l'opinion attacha le dernier opprobre aux injures les pl«_,.l$ frîvoles, à une parole, a un geste, souilerts sans retou 2î- Ainsi, le sentiment de la vengeance leur était inspiré par É il nature; mais l'excès de la vengeance et la nécessité absoh,19 de se venger furent l’ouvrage de la réflexion '. Or, combi? D

  • Add. : [« Le duel avait un bon aow, était de mettre un frein A |’in.-;·+·"

« _lenee des grands, et de rapprocher un peu les hommes, en les obligeanl ‘ ·< des égards. Mais le moyen donné aux petits, pour tenir les grands en 1.*5 · poct, n‘était pas d'une justice fort exacte, puisque l'offensé ne pouvait vl-' I" u ger son injure qu'au péril de sa propre vic; et, à mon avis, ce n‘est [P·"" • f ain: tort aux faibles que de leur oler une telle ressource. »] 1