Page:Œuvres de Vauvenargues (1857).djvu/408

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354 ESSAI 50. — LE rnrrisun msmor;. Un homme Jarfaitement insi ide est celui ui loue in- 1 . . P . . distinctement tout ce qu’il croit utile de louer, sans esprit, ni pudeur; qui, 1orsqu'on lui lit un mauvais roman, mais protégé d’une société, le trouve digne de l’auteur du S0· phs', et~feint de le croire de lui; qui demande à un grand seigneur qui lui montre une ode, pourquoi il ne fait pas une tragédie ou un poème épique; qui, du méme éloge qu’il donne à Voltaire, régale un auteur qui s’est fait siffler sur les trois théâtres; qui, se trouvant a souper chez une femme qui a la migraine, lui dit tristement que la vivacité de son , esprit la consume comme Pascal, et qu’il faut Pempècher de se tuer ’. S’il arrive àuu homme de ce caractère de faire une plaisanterie sur quelqu'un qui n'est pas riche, mais dont un homme riche prend le parti, aussitot le flatteur change de langage, et dit que les petits défauts qu’il re· prenait servent d’ombre au mérite distingué. C’est l'homme dont Rousseau disait : _ Quelquefois meme aux bons mots s'nbandormc, Mais doucement, et sans blesser personne. Cet homme, qui a loué toute sa vie jusqu’à. ceux qu' il ' aimait le moins, n’a jamais obtenu des autres la moindre louange, et tout ce que ses amis ont osé dire de plus fort pour lui, c'est ce vieux discours : En vérité, c'cst un hon- — nétc garçon, ou c'est un bon homme.

  • Roman de Crébillon le flls, alors fort a la mode. — G.

‘ Add. : ·¤ Un homme qui n'a point d'avis A soi, qui fait profession de sui- « ne l‘avis des autres, qui sait meme, dans le besoin, associer les contraires, « pour ne contredire personne; enfin, un esprit subalterne, qui est né pour « céder, pour tléchir, et pour porter le joug des autres hommes, par inclina- ¤ tion et par choix. • — Var. : [Enfin, un panégyristo éternel des mœurs et M des vices du monde, un complsisant timide et servile, qui n'a d‘autrc ¤ gout nl d'autre sentiment que celui du cercle qu’il fréquente, qui ne peut • résister en face a aucun homme, et qui est né pour Iléclilr, toute sa vie, · • sous l'opinion ct les préjugés des autres. •]