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INTRODUCTION


À LA CONNAISSANCE


DE L’ESPRIT HUMAIN




LIVRE PREMIER


1. — De l’Esprit en général.

Ceux qui ne peuvent rendre raison des variétés de l’esprit humain, y supposent des contrariétés inexplicables. Ils s’étonnent qu’un homme qui est vif, ne soit pas pénétrant ; que celui qui raisonne avec justesse, manque de jugement dans sa conduite ; qu’un autre qui parle nettement, ait l’esprit faux, etc. Ce qui fait qu’ils ont tant de peine à concilier ces prétendues bizarreries, c’est qu’ils confondent les qualités du caractère avec celles de l’esprit, et qu’ils rapportent au raisonnement des effets qui appartiennent aux passions. Ils ne remarquent pas qu’un esprit juste, qui fait une faute, ne la fait quelquefois que pour satisfaire une passion, et non par défaut de lumière ; et lorsqu’il arrive à un homme vif de manquer de pénétration, ils ne songent pas que pénétration et vivacité sont deux choses assez différentes, quoique ressemblantes, et qu’elles peuvent être séparées. Je ne prétends pas découvrir toutes