Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/123

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serres brûlantes, et t’abandonne dans le ciel une espace plus que suffisant. Quel que soit l’empire qui t’est réservé (car les enfers n’oseraient t’espérer pour roi, et tu ne saurais pousser jusque-là le désir de régner, quoique la Grèce vante ses Champs-Élysées et que Proserpine dédaigne la voix d’une mère qui l’appelle), rends ma course facile, favorise mes efforts et mon audace ; et, sensible comme moi aux peines des laboureurs, viens les guider dans les routes qu’ils ignorent ; et accoutume toi à recevoir, dès à présent, les vœux des mortels.

Au retour du printemps, quand, du sommet des montagnes qu’elle blanchissait, la neige fondue commence à s’écouler, quand la glèbe s’amollit et cède au souffle du Zéphyr, je veux déjà voir le taureau gémir sous le poids du joug, et le soc de la charrue briller dans le sillon. La terre ne comblera les vœux du laboureur avide que si elle a senti deux fois les chaleurs de l’été, deux fois les rigueurs de l’hiver : c’est alors que les greniers crouleront sous le poids de la récolte.

Mais, avant d’enfoncer le fer dans une terre inconnue, il faut étudier l’influence des vents qui y règnent, la nature du climat, les procédés de l’expérience, les traditions locales, enfin les productions que donne ou refuse chaque contrée. Ici jaunissent les moissons ; là mûrissent les vignes ; ailleurs, les arbres et les