Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/219

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refoulées par le vent, s’amassent et se replient en deux courants contraires, est un antre profond, où le matelot, surpris par la tempête, trouve un refuge assuré. C’est là que repose Protée sous l’abri d’un vaste rocher. Cyrène y place son fils dans un endroit secret et obscur ; et, enveloppée d’un nuage, elle se tient à l’écart.

Déjà l’ardent Sirius lançait du haut des cieux ces feux ardents qui brûlent l’Indien altéré ; le soleil, avec ses feux, avait atteint le milieu de sa carrière ; l’herbe languissait desséchée, et la chaleur faisait bouillonner le limon des fleuves taris, lorsque Protée, quittant le sein des flots, s’avance vers son antre accoutumé. Autour de lui, le peuple humide des mers bondit et fait au loin jaillir une amère rosée. Les phoques s’étendent çà et là pour se livrer au sommeil. Semblable au berger vigilant qu’on voit sur les montagnes, lorsque l’étoile du soir rappelle les jeunes taureaux à l’étable, et que les agneaux irritent par leurs bêlements l’avidité des loups, Protée s’assied au milieu d’eux sur un rocher, et compte son troupeau.

Aristée saisit l’occasion favorable : il laisse à peine au vieillard le temps d’étendre ses membres fatigués, se précipite sur lui avec un grand cri, et se hâte de lui lier les mains. Fidèle à ses ruses,