Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/263

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présents d’Énée ; ils admirent Iule, l’ardent visage du dieu, la feinte douceur de son langage, et le manteau de pourpre, et le voile où l’acanthe enlace ses feuilles d’or. Didon surtout, la malheureuse Didon, dévouée aux fureurs prochaines de Vénus, ne peut rassasier son cœur ; elle s’enflamme en regardant le faux Iule, également émue par la vue de l’enfant et par les dons qu’il lui offre. Pour lui, après s’être suspendu au cou d’Énée, après avoir par ses embrassements contenté la vive tendresse d’un père abusé, il se présente à la reine : elle attache sur lui ses yeux et toute son âme. Quelquefois elle le presse sur son sein, et ne sait pas, l’infortunée ! quel dieu terrible est assis sur ses genoux. Mais lui, se souvenant des vœux de sa mère, efface par degrés, dans le cœur de Didon, le souvenir de Sychée, et cherche à glisser un feu vif et nouveau dans ce cœur depuis longtemps paisible et déshabitué de l’amour.

Le repas achevé, et les tables enlevées, on apporte de larges coupes, et l’on couronne le vin. Un grand bruit se fait entendre, et les voix résonnent en éclats sous les vastes lambris. Aux plafonds dorés sont suspendus des lustres étincelants, et la flamme brillante triomphe des ombres de la nuit. Alors la reine se fait apporter et remplit de vin le cratère, enrichi d’or et de pierreries, dont s’étaient servis Bélus et les descendants de Bélus. Soudain,