Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/292

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tombe la dépouille d’Hector, et me renvoya dans mes états. »

Ainsi parle le vieillard ; et, de sa faible main, il jette contre Pyrrhus un trait impuissant, que repousse l’airain sonore, et qui s’attache à peine à la ronde surface du bouclier : « Eh bien, répond Pyrrhus, va donc, en messager, porter cette nouvelle à mon père ! Souviens-toi de lui raconter mes tristes exploits, et de lui dire que Néoptolème dégénère. Maintenant, meurs ! » Il dit, et traîne à l’autel Priam tremblant, qui chancelle et glisse dans le sang de son fils. Pyrrhus le saisit, de la main gauche, par les cheveux, et, de la droite, levant son glaive étincelant, il le lui plonge tout entier dans le flanc.

Ainsi finirent les destins de Priam ; ainsi tomba, à la vue de Troie embrasée et des ruines de Pergame renversée, ce superbe dominateur de l’Asie, roi de tant de peuples et de tant de contrées ! Ce n’est plus qu’un tronc sanglant, gisant sur le rivage, une tête séparée des épaules, un cadavre sans nom.

Alors, pour la première fois, une sombre horreur m’environne ; dans la stupeur dont je suis saisi, l’image de mon père chéri vient s’offrir à ma pensée, à l’aspect de ce roi, du même âge que lui, si cruellement égorgé. Je pense à Créuse abandonnée, à ma maison saccagée, et aux dangers du jeune Iule. Je regarde autour