Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/636

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Fortune se fait un jeu habituel de remettre dans une ferme assiette ceux qu’elle a renversés. Diomède nous refuse l’appui de ses armes ; mais n’avons-nous pas Messape, l’invulnérable Tolumnius, et tous les chefs de nos nombreux alliés ! Quelle gloire un jour pour le Latium de n’avoir dû son salut qu’à ses propres forces ! N’avons-nous pas aussi la reine des Volsques, l’héroïque Camille, à la tête de sa cavalerie et de ses escadrons brillants d’airain ? Si je fais seul obstacle au bonheur public ; si c’est moi seul que le Troyen appelle au combat, et si ce défi vous plaît, je ne me crois pas encore assez haï de la Victoire pour sacrifier de si belles espérances. Oui, je marcherai avec courage contre mon rival, fût-il supérieur au grand Achille, fût-il couvert, comme lui, d’armes forgées par les mains de Vulcain. Turnus, qui prétend ne le céder en valeur à aucun de ses aïeux, se dévoue tout entier à vous, à Latinus, mon beau-père ! C’est moi seul qu’Énée défie : tant mieux ! Je le souhaite ardemment. Si les dieux sont contre nous, que Drancès ne meure pas à ma place ; ou, si la gloire devient la récompense de mon courage, qu’il ne me l’enlève pas. »

Tandis que, dans leurs perplexités, ils se livraient à ces violents débats, Énée levait son camp et mettait son armée en mouvement. Tout à coup, au milieu d’un grand tumulte, un messager