Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/688

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plaît de moins en moins à voir la fougueuse allure de ses coursiers. Soudain, apportés par les vents, arrivent jusqu’à lui les cris confus d’une terreur dont il ignore les causes : le bruit de la ville en désordre et les murmures lamentables frappent son oreille attentive. « Hélas ! dit-il, quel deuil affreux trouble nos remparts ? D’où vient cette horrible clameur qui, de toute la ville, me parvient jusqu’ici ? » Il dit, et, hors de lui, il retient les rênes, et s’arrête pour écouter. Alors sa sœur, qui, sous la figure du cocher Métisque, dirigeait le char et l’attelage, le prévient en ces mots : « Turnus, c’est par ici qu’il nous faut poursuivre les Troyens ; c’est le chemin que nous ouvre la Victoire : Énée fond sur les Italiens et s’abandonne à toute sa fureur guerrière. Et nous aussi, portons la mort parmi les Troyens : tu ne resteras au-dessous de lui ni par le nombre des victimes, ni par la gloire du combat. — Ma sœur, lui répond Turnus, je t’ai reconnue dès le moment où, par tes artifices, tu as rompu le traité et t’es jetée au milieu des combats ; et maintenant tu ne peux m’abuser, quoique déesse. Mais qui donc t’a fait descendre de l’Olympe pour t’imposer une si rude tâche ? Est-ce pour voir la mort cruelle de ton malheureux frère ? Car, maintenant, que ferai-je ? et quel espoir de salut me laisse la Fortune ? J’ai vu le plus cher de mes compagnons d’armes, Murranus, expirer en m’appelant à son se-