Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/275

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d’Inglis, au lieu de m’obéir, s’est ouvertement révolté contre moi. Mais que faire maintenant ? — Je n’ai pas la liberté du choix, major ; j’ai été remis en liberté sur parole, et j’ai promis de me rendre à Édimbourg. Vous et ces dames, vous prendrez la même route. J’ai, par la protection d’un ami, obtenu un sauf-conduit et des chevaux pour vous et vos gens. Pour l’amour de Dieu, hâtons-nous. Vous ne pouvez vouloir défendre ce château avec huit ou dix hommes et sans provisions. Vous avez satisfait à l’honneur et servi les intérêts du gouvernement, par la défense prolongée de cette place. Le reste serait inutile et insensé. Les troupes anglaises sont arrivées à Édimbourg, et vont se diriger sur Hamilton ; abandonnons pour quelques jours aux rebelles la possession de Tillietudlem. — Je sais, » dit le vieux militaire avec un soupir de regret, « je sais que vous ne conseillerez jamais rien qui soit contre l’honneur ; si donc vous jugez notre position absolument désespérée, je rendrai cette place, que d’ailleurs la mutinerie de vos dragons ne nous permet plus de défendre… Gudyill, dites à nos dames d’appeler leurs servantes, et de faire tout préparer pour le départ. Mais si je pouvais croire qu’en restant dans ces vieux murs, dussé-je être réduit par la faim à l’état d’un squelette, je rendrais le moindre service au roi, le vieux Miles Bellenden n’en sortirait que lorsqu’il n’aurait plus une goutte de sang dans les veines. »

Les dames, qui avaient été épouvantées par la révolte des dragons, s’empressèrent d’acquiescer à la détermination du major. Lady Marguerite Bellenden ne put cependant retenir des soupirs et des gémissements en pensant au déjeuner que Sa très-sacrée Majesté avait fait dans un château qu’elle allait abandonner aux rebelles. On fit à la hâte les préparatifs du départ ; et long-temps avant que le jour permît de distinguer nettement les objets, les dames, avec le major Bellenden, Harrison, Gudyill et les autres domestiques, montèrent sur les chevaux qu’avaient amenés les soldats de Morton, ainsi que sur plusieurs autres qu’on se procura dans le voisinage, et se dirigèrent vers le nord, sous l’escorte de quatre cavaliers whigs. Le reste de la troupe qui avait accompagné lord Evandale prit possession du château sans y commettre aucun acte de violence et de pillage ; et le soleil levant vit flotter sur la tour de Tillietudlem le drapeau rouge et bleu des covenantaires écossais.