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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/48

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presbytériens réfractaires. Ils étaient tellement accoutumés à de pareilles missions, qu’ils se croyaient libres de commettre toute espèce de vexations avec impunité, affranchis de toute obéissance aux lois et à l’autorité, et seulement obligés de se conformer aux ordres de leurs officiers. Bothwell était ordinairement le premier à se montrer dans de semblables occasions.

Il est probable que Bothwell et ses compagnons ne seraient pas restés si long-temps tranquilles sans le respect qu’ils portaient à leur cornette, commandant la troupe casernée dans la ville, et qui était engagé dans une partie de dés avec le curé de l’endroit. Mais ces deux personnages ayant incontinent quitté leur jeu pour s’entretenir avec le principal magistrat de quelque affaire pressée, Bothwell commença à témoigner le mépris que lui inspirait le reste des assistants. — N’est-il pas étrange, Holliday[1], dit-il à son camarade, de voir ces rustres assis près de nous, et buvant depuis long-temps sans songer à porter la santé du roi ? — Ils y ont pensé, dit Holliday ; j’ai entendu ce garçon habillé en vert porter un toast à Sa Majesté. — Ils ont bien fait, répartit Bothwell ; mais alors, Tom, il faut que nous les fassions boire à la santé de l’archevêque de Saint-André, ce qu’ils feront en se mettant à genoux. — Approuvé, approuvé, par Dieu ! dit Holliday ; et celui qui refusera, nous le ferons conduire au corps-de-garde, et là nous lui apprendrons à monter le poulain né d’un gland[2], avec une couple de carabines à chaque pied pour le tenir ferme sur les étriers. — Très bien, très bien ! continua Bothwell : et pour faire tout dans les règles, je commencerai par ce drôle à bonnet bleu, placé près de la cheminée, et dont l’aspect est sombre et refrogné. »

En disant ces mots, il se leva, et mettant son sabre engaîné sous son bras pour soutenir l’insolence qu’il avait méditée, il se plaça vis-à-vis de l’étranger que Niel Blame avait désigné lorsqu’il faisait le sermon à sa fille, et qu’il avait jugé être, selon toute probabilité, un montagnard ou un presbytérien réfractaire,

« Mon bien-aimé[3], » dit le sergent d’un ton de solennité affectée, et imitant le nasillement d’un prédicateur de campagne ; « mon bien-aimé, je prends la liberté de vous prier de vouloir bien quitter votre siège, et de ployer vos jarrets jusqu’à ce que vos

  1. Ce mot est une corruption de holyday, qui veut dire saint jour ou fête. a. m.
  2. Métaphore pour exprimer le cheval de bois. a. m.
  3. Expression usitée dans un sens ironique, par allusion au même terme qui fréquemment se trouve dans le sermon des puritains. a. m.