Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/456

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Dugald Dalgetty de Drumthwacket, major dans un régiment de loyaux Irlandais, et envoyé extraordinaire de haut et puissant lord James comte de Montrose. Et vous, quel est votre nom ? — Il vous servira peu de le connaître, reprit son taciturne compagnon. — Laissez-m’en juger moi-même. — Eh bien, je suis Ranald Mac Eigh, c’est-à-dire Ranald, Enfant du brouillard. — Enfant du Brouillard ! s’écria Dalgetty ; je dirais plutôt, Enfant des Ténèbres. Mais, Ranald, puisque tel est votre nom, par quel hasard êtes-vous dans la prison prévôtale ? qui diable vous a amené ici ? — Mes malheurs et mes crimes, répondit Ranald. Connaissez-vous le chevalier d’Ardenvohr ? — Parfaitement, répondit Dalgetty. — Mais savez-vous où il est maintenant ? — Il jeûne aujourd’hui à Ardenvhor, pour pouvoir mieux manger demain à Inverary ; et si par hasard il ne venait pas, mes jours seraient en danger. — Alors apprenez-lui que quelqu’un qui est son plus grand ennemi et son meilleur ami en même temps réclame son intercession. — En vérité, je désirerais me charger d’un message moins énigmatique. Sir Duncan n’est pas un homme à qui on puisse proposer des énigmes. Pensez donc qu’on vous coupera la tête pendant qu’il se creusera la sienne pour les deviner. — Lâche Saxon, dis-lui que je suis le corbeau qui, il y a quinze ans, a fondu sur sa tour et sur les enfants qu’il y avait laissés ; que je suis le loup qui a découvert sa caverne sur le rocher et détruit sa race ; enfin, que je suis le chef de la bande qui a surpris Ardenvohr il y a eu hier quinze ans, et passé ses quatre enfants au fil de l’épée. — En vérité mon honnête ami, si ce sont là tous vos droits à la faveur de sir Duncan, je ne plaiderai pas votre cause ; car si les bêtes brutes sont furieuses contre ceux qui détruisent leur progéniture, à plus forte raison des créatures raisonnables, des chrétiens le sont-ils. Mais dites-moi je vous prie, si vous avez attaqué le château par la petite hauteur appelée Drumsnab, que je soutiens être le véritable point d’attaque tant qu’on ne le défendra pas par une redoute. — Nous escaladâmes le rocher au moyen d’échelles de cordes qui nous furent jetées par un complice de notre clan, qui avait servi six mois dans le château pour se procurer cette seule nuit de vengeance. Les hiboux croassaient autour de nous pendant que nous étions suspendus entre le ciel et la terre ; la marée vint battre le pied du rocher, et brisa notre esquif : cependant le courage ne nous manqua pas ; et le matin il n’y avait que du sang et des cendres là où régnaient