Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/459

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En parlant ainsi, l’étranger ouvrit une lanterne sourde, dont les faibles rayons firent entrevoir à Dalgetty que l’interlocuteur qui s’était mystérieusement réuni à leur société et mêlé à leur conversation, était un homme d’une haute taille, enveloppé dans un manteau à la livrée du marquis. Il regarda d’abord à ses pieds ; mais il ne vit ni le pied fourchu que les légendes écossaises donnent à l’ennemi du genre humain, ni le pied de cheval auquel on le reconnaît en Allemagne. Sa première demande fut de savoir comment l’étranger avait pénétré jusqu’à eux.

« Car, dit-il, si la porte avait été ouverte, on aurait entendu le bruit de ces barres rouillées ; et si vous êtes passé par le trou de la serrure, en vérité, monsieur, malgré tout ce que vous pouvez dire, vous n’êtes pas fait pour être enrôlé dans un régiment d’hommes vivants. — Je conserve mon secret, répondit l’étranger, jusqu’à ce que vous méritiez qu’il vous soit découvert en me communiquant le vôtre. Il serait possible que je vous fisse sortir par où je suis entré. — Ce ne sera pas, du moins, par le trou de la serrure, dit le major, car ma cuirasse m’arrêterait au passage, en supposant que mon casque pût y passer. Quant à des secrets, je n’en ai aucun pour ma part, et qu’un bien petit nombre appartenant aux autres. Mais dites-nous ce que vous désirez savoir, ou, comme le professeur Snufflegreek[1] avait coutume de le dire au collège Mareschal à Aberdeen, parle pour que je te connaisse. — Ce n’est point à vous que j’ai d’abord affaire, » répliqua l’étranger en tournant sa lumière directement sur les traits sauvages et amaigris et sur les membres vigoureux du Highlander Ranald Mac Eagh, qui, debout contre le mur de la prison, semblait encore incertain si leur hôte était un être vivant.

« Je vous ai apporté quelque chose, l’ami, » dit l’étranger d’un ton plus doux, « pour améliorer vos provisions ; car si vous devez mourir demain, ce n’est pas une raison pour ne point vivre cette nuit. — Non, certainement, il n’y a pas de raison pour cela, » répliqua le major, dont l’appétit était toujours ouvert ; et il se mit aussitôt en devoir d’examiner le contenu d’un petit panier que l’étranger avait apporté sous son manteau, tandis que le Highlander, soit par soupçon, soit par dédain, ne faisait aucune attention aux signes par lesquels il l’engageait à suivre son exemple.

  1. Nom fictif, qui veut dire nasillant le grec. a. m.