Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/538

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homme, ne pouvait la persécuter ainsi : cet homme, le Destin l’a mis, dit-on, à l’abri de ma vengeance ; mais l’avenir fera voir si elle peut m’échapper. — Milord Menteith, » s’écria sir Duncan en se soulevant sur son lit, » cet homme est un traître ; il est à la fois l’ennemi du roi, du parlement, de Dieu et des hommes ; c’est un Enfant du Brouillard, un scélérat, un proscrit ; il est l’ennemi de votre maison, de celle de Mac-Aulay, et de la mienne. J’espère que vous ne souffrirez pas que ces moments, qui sont peut-être les derniers qui me restent, soient empoisonnés par son triomphe barbare. — Il sera traité comme il le mérite, dit Menteith ; qu’on l’éloigné à l’instant. »

Sir Dugald crut devoir s’interposer alors dans cette affaire, en parlant des services que Ranald avait rendus a l’armée comme guide ; et il termina cette apologie en répétant, comme à l’ordinaire, que cet homme ayant été placé sous sa sauvegarde, il devait répondre de lui. Cependant la voix rauque et sonore de l’Enfant du Brouillard couvrait celle du major :

« Non, non ! s’écriait-il, laissez-les préparer la torture et le gibet, laissez-les livrer mon corps aux faucons et aux aigles de Ben-Nevis. Par ce moyen, cet orgueilleux chevalier et ce fier comte ne connaîtront jamais le secret que seul je puis leur apprendre, secret qui ferait tressaillir de joie le cœur d’Ardenvohr, fût-il à l’agonie ; secret que le comte de Menteith achèterait au prix de toutes ses possessions. Approche, Annette Lyle, » dit-il en se soulevant avec une force à laquelle on ne s’attendait pas ; « approche, Annette, ne crains pas la vue de celui qui a pris soin de ton enfance ; viens dire à ces hommes vains et superbes, qui te méprisent parce qu’ils te croient issue de mon ancienne race, que ton sang n’est pas le nôtre, que tu n’es pas une Fille du Brouillard, mais que tu es née dans la demeure des grands, et que tu as dormi dans un berceau aussi doux qu’aucun de ceux que l’orgueil inventa dans ses palais dorés. — Au nom de Dieu ! dit Menteith tremblant d’émotion, « si vous savez quelque chose sur la naissance de cette jeune fille, révélez-le, et avant de quitter ce monde, déchargez au moins votre conscience du poids de ce secret. — Et que ne me dites-vous aussi de bénir mes ennemis à mon dernier soupir ! » reprit Mac-Eagh en fixant sur lui un regard plein de malignité. » Telles sont les maximes que vous prêchent vos prêtres ; mais quand et envers qui les mettez-vous en pratique ? Avant de découvrir mon secret, il faut que je sache de quel prix