Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/80

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derrière lui le bruit du galop d’un cheval. Il se retourna et vit qu’il était poursuivi par le jeune Bucklaw, qui avait été retenu pendant quelques minutes, n’ayant pu résister à la tentation de donner au garçon d’écurie de l’auberge la recette du remède pour guérir le cheval boiteux. Il avait regagné le temps perdu en mettant son cheval au grand galop, et atteignit bientôt le maître dans un endroit où la route traversait un terrain stérile et marécageux.

« Arrêtez, monsieur ! s’écria Bucklaw ; je ne suis point un agent politique, un capitaine Craigengelt, dont la vie est trop précieuse pour qu’il veuille la hasarder à défendre son honneur. Je suis Franck Hayston de Bucklaw, et personne ne m’insulte par un mot, une action, un geste ou un regard, que je ne le force à m’en rendre raison. — Tout cela est fort bien, M. Hayston de Bucklaw, » répondit le Maître de Ravenswood du ton le plus calme et le plus indifférent ; « mais je n’ai point de querelle avec vous, ni ne désire en avoir. Nos routes vers nos demeures, aussi bien que nos routes à travers la vie, ont des directions différentes ; je ne vois pas que nous ayons des motifs pour nous croiser. — Non ? » dit Bucklaw avec impétuosité ; « de par le ciel, je dis, moi, qu’il y en a : vous nous avez appelés aventuriers intrigants. — Votre mémoire n’est pas fidèle, M. Hayston, c’est à votre compagnon que j’ai appliqué cette épithète, et vous savez qu’il n’est pas autre chose. — Eh bien ! qu’importe, il était mon compagnon alors, et jamais je ne souffre qu’on insulte mon compagnon, soit à tort, soit avec raison, tant qu’il sera dans ma compagnie. — Alors, M. Hayston, » dit Ravenswood avec le même sang-froid, « vous devriez mieux choisir votre société ; car, sans cela, il est probable que vous aurez beaucoup à faire en votre qualité de champion de ceux qui la composent. Retournez chez vous, monsieur, dormez, et demain vous conserverez quelque raison au milieu de votre courroux. — Non pas, Maître, vous ne connaissez pas votre homme. De grands airs et de grandes maximes de prudence ne vous tireront pas d’affaire avec moi. D’ailleurs, vous m’avez appelé un écervelé, et je veux que vous vous rétractiez avant que nous nous séparions. — Certes, ce ne sera pas une chose facile, à moins que vous ne me donniez des raisons de croire que je me suis trompé, meilleures que celles que vous me donnez en ce moment. — Eh bien ! Maître, malgré le regret que j’ai de parler ainsi à un homme de votre qualité, si vous ne voulez ni justifier