— Et moi, reprit Gurth, je parierais que j’ai entendu la voix du brave archer qui remporta ce prix, et la lune n’est pas vieillie de trois fois vingt-quatre heures depuis cette nuit-là.
— Mes braves amis, » leur dit l’archer, qui, malgré leurs réflexions faites à voix basse, les avait entendus, « peu vous importe en ce moment qui je suis et ce que je parais être. Si je parviens à délivrer votre maître, vous aurez raison de me regarder comme le meilleur de vos amis. Que je porte tel ou tel nom, que je tire de l’arc tant bien que mal, à peu près comme un gardeur de vaches ; que j’aime à me promener à la lumière du soleil ou au clair de la lune, ce sont des choses qui ne vous regardent pas, et dont vous feriez mieux de ne pas vous occuper.
— Nos têtes sont dans la gueule du lion, et je ne sais comment nous pourrons nous en tirer, » murmura le fou à l’oreille de Gurth.
« Paix ! répondit ce dernier ; garde-toi de l’offenser par quelque folie ; j’ai pleine confiance en lui. »
CHAPITRE XX.
Ce ne fut qu’au bout de trois heures d’une marche pénible que les deux serviteurs de Cedric et leur guide mystérieux arrivèrent à une clairière, au milieu de laquelle s’élevait un énorme chêne dont les branches entrelacées et touffues s’étendaient de tous côtés. Sous cet arbre étaient couchés quatre ou cinq yeomen, tandis qu’un autre, placé en sentinelle, se promenait au clair de lune.
Au bruit des pas de gens qui approchaient, la sentinelle donna l’alarme ; les dormeurs furent debout à l’instant, saisirent leurs arcs, et six flèches s’apprêtaient à partir dans la direction par laquelle arrivaient les voyageurs. Mais leur guide s’étant fait recon-