gageraient leur vie aussi facilement qu’ils engagent leurs terres. Tu ratifieras, tu accompliras toutes les promesses que je pourrai faire en ton nom, mon frère ?
— N’en doute pas ; et je bénis le ciel, qui dans ma misère m’a envoyé un tel consolateur… Cependant garde-toi de leur accorder trop promptement ce qu’ils te demanderont ; car c’est le propre de cette race maudite de demander des marcs pour obtenir des onces. Au surplus, fais comme tu jugeras convenable, car je suis au désespoir : à quoi me servirait tout mon or, si l’enfant de mon amour venait à périr ?
— Adieu donc, dit Nathan, et puisse-t-il t’arriver selon tes désirs ! »
Ils s’embrassèrent et partirent chacun par une route différente. Higg les regarda s’éloigner.
« Ces chiens de juifs ! » dit-il au bout de quelques instants, « ne pas faire plus d’attention à un membre libre d’une corporation, que si j’étais un esclave ou un Israélite circoncis comme eux ! Ils auraient bien pu, il me semble, me jeter un ou deux sequins. Rien ne m’obligeait à leur apporter ce maudit griffonnage, au risque d’être ensorcelé, comme bien des gens m’en ont averti. Je me soucie bien du morceau d’or que la jeune fille m’a donné, si, à Pâques prochain, lorsque j’irai à confesse, je dois être blâmé par le prêtre, et obligé de lui donner le double pour me réconcilier avec l’Église, et peut-être encore, par dessus le marché, recevrai-je le nom de messager boiteux des juifs ? Je crois, en vérité, que cette fille m’a ensorcelé pendant que je me tenais dans la salle. Mais il a en toujours été de même ; juif ou gentil, toutes les fois que, dans sa maison, il y avait une commission à faire, personne ne pouvait rester en place ; et, ma foi ! moi-même, quand j’y pense, je donnerais outils, boutique, enfin tout ce que je possède, pour lui sauver la vie. »
CHAPITRE XXXIX.
Le jour où le jugement de Rébecca, si on peut l’appeler ainsi, avait été prononcé, était sur son déclin : le soleil faisait place aux