Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/184

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qui provenait à la fois de la crainte des maraudeurs de son oncle et de sa manière de vivre retirée, dont les opinions superstitieuses du temps et du pays tiraient un étrange parti.

Ce ne fut pas sans éprouver quelque chose de tout cela que Mysie se vit seule avec une jeune personne dont le rang était si au-dessus du sien, et dont les manières étaient si différentes ; car le digne meunier avait saisi la première occasion de sortir sans être aperçu, pour aller voir si la grange était bien garnie, et quelle serait la quantité de mouture qu’elle apporterait au moulin. Il y a toutefois dans la jeunesse une espèce de franc-maçonnerie qui, sans grande conversation, apprend aux jeunes personnes à démêler tout de suite leur caractère mutuel, et à se mettre à l’aise après une fort courte connaissance. C’est seulement lorsque nous avons éprouvé les tromperies des hommes que nous cherchons à éviter leur observation et à cacher nos sentiments réels à ceux avec lesquels nous sommes en relation.

Les deux jeunes filles furent bientôt occupées d’objets convenables à leur âge. Elles visitèrent les pigeons de Marie Avenel, que cette dernière nourrissait avec la tendresse d’une mère ; elles vinrent ensuite à l’agréable examen de la toilette de Marie : toilette peu somptueuse, mais contenant des choses qui excitèrent le respect de sa compagne ; car Mysie avait un trop bon caractère pour éprouver la moindre envie. Un rosaire d’or et quelques ornements de femme, marques distinctives d’un rang supérieur, avaient été sauvés au moment de leur dernier malheur par la présence d’esprit de Tibb-Tacket ; car celle à qui ils appartenaient était, dans ces tristes instants, trop accablée de chagrins pour penser à de semblables choses. À leur vue, Mysie fut saisie de vénération ; car, à l’exception de ce que le seigneur abbé et le couvent possédaient, elle ne croyait pas qu’il y eût beaucoup plus d’or dans le monde que n’en contenaient ces bijoux ; et Marie, toute sérieuse qu’elle fût naturellement, s’amusait assez de l’admiration de sa rustique compagne.

Rien n’offrait un plus grand contraste que l’aspect de ces deux jeunes filles : d’un côté, la mine joyeuse, riante et animée de la fille du moulin, qui regardait avec un extrême étonnement les choses précieuses placées devant elle, et les louait avec l’approbation d’une inférieure humble et contente, faisant les plus minutieuses questions sur l’usage et la valeur de chaque ornement, tandis que, de l’autre, Marie Avenel, avec une tranquille dignité