Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/251

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ce qui, aux termes où nous en sommes avec l’Angleterre, est une chose fort essentielle.

— En vérité, dit l’abbé, cette réflexion serait très-juste, si nous pouvions donner un meilleur abri au chevalier ; mais je ne connais pas un refuge plus convenable dans Sainte-Marie ; cependant je ne sais que conseiller à notre digne hôte, lorsque je considère la pétulance effrénée de ce jeune opiniâtre.

— Bah ! mes révérends pères, s’écria sir Piercy, pour qui me prenez-vous ? Je vous jure sur mon honneur, que si je devais faire un choix, je voudrais habiter cette maison. J’aime à voir un jeune homme montrer de la vivacité, quand même il devrait en tomber un peu sur ma tête. Je vous proteste que je veux demeurer ici, vivre en ami avec ce bon villageois. Nous irons à la chasse ensemble et nous verrons bien s’il est bon tireur ; j’espère envoyer bientôt à monseigneur l’abbé un daim de la meilleure espèce, tué avec tant d’art que le révérend cuisinier en sera tout joyeux. »

Ceci fut dit avec une bonne humeur si bien jouée, que l’abbé ne poussa pas plus loin ses observations sur ce qui venait d’arriver, mais s’occupa de donner à son hôte le détail des meubles, tapisseries et provisions qu’il se proposait d’envoyer à la tour de Glendearg pour lui rendre ce séjour plus supportable. Ce discours, assaisonné d’une ou deux coupes de vin, servit à faire passer le temps jusqu’au moment où l’abbé ordonna à sa cavalcade de se préparer à reprendre le chemin du couvent.

« Comme nous avons perdu notre méridienne[1], dit-il, indulgence sera donnée à ceux des frères qui nous accompagnent, et qui ne pourront pas par lassitude se rendre à prime[2], et ceci par pure miséricorde ou indulgentiâ[3]. »

Ayant bénévolement accordé à ses fidèles moines une faveur qu’il jugeait devoir leur être très-agréable, le bon abbé, voyant que tout était prêt pour le départ, donna sa bénédiction à la fa-

  1. Heure du midi, qui dans les couvents était employée au sommeil, alors nécessaire, à cause des règles monastiques qui obligeaient les frères à des prières nocturnes, comme les vigiles et autres. a. m.
  2. Prime était le service de minuit chez les moines. a. m.
  3. Miséricorde, selon le savant ouvrage de Fosbrooke sur les usages des moines anglais, voulait non seulement, observe Walter Scott, dire une indulgence ou une exemption de devoirs particuliers, mais aussi un appartement particulier dans un couvent où les moines s’assemblent pour jouir de telles indulgences ou permissions qui leur étaient concédées au-delà des règles. a. m.