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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/323

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un idiot ? prétendez-vous me faire croire que le sang tout frais, dont votre chemise est tachée, a coulé d’une blessure fermée depuis des semaines ou peut-être depuis des mois ? Misérable railleur ! croyez-vous nous aveugler ainsi ? Je sais trop bien que ce sang est celui de votre victime, qui a succombé dans un combat à mort. »

Le chevalier, après un moment de réflexion, répondit : « Je serai sincère avec vous, mon père, et je vous ouvrirai mon âme ; mais ordonnez à ces gens de se tenir à une distance assez éloignée pour n’être point à portée de nous entendre ; alors seulement je vous dirai tout ce que je sais de cette mystérieuse affaire ; néanmoins ne vous étonnez pas, je vous prie, s’il vous arrive de ne point la comprendre parfaitement ; car moi-même, je l’avoue, je la trouve trop obscure pour mon esprit. »

Le père Eustache ordonna à Édouard et aux deux autres hommes de se retirer, en assurant le premier que son entretien avec le prisonnier serait court, et lui permettant de garder la porte de l’appartement, condescendance sans laquelle, peut-être, il aurait eu quelque difficulté à obtenir qu’il s’éloignât. Aussitôt qu’Édouard eut quitté la chambre, il envoya des exprès à une ou deux familles du voisinage, avec les fils desquelles lui et son frère étaient liés, afin de les informer qu’Halbert Glendinning avait été assassiné par un Anglais, et les sommer de se rendre sans délai à la tour de Glendearg. La vengeance, en pareil cas, était regardée comme un devoir si sacré, qu’il ne mettait nullement en doute qu’ils ne vinssent à l’instant, accompagnés de forces suffisantes pour assurer la détention du prisonnier. Il ferma alors les portes de la tour, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur ; et, après avoir pris ces précautions, il alla offrir ses consolations à sa famille, verser des larmes avec elle, et lui jurer qu’il tirerait vengeance du meurtre de son frère.