Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/164

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de toucher autre chose que la fleur de bruyère ; il fallait entendre sa voix, aussi douce, aussi mélodieuse que le chant d’une grive, se mêler à nos cris joyeux. Et comme les seigneurs se pressaient autour d’elle ! heureux celui qui en obtenait une parole ou un regard ! on se laissait déchirer à travers les taillis, on risquait de se rompre le cou pour se montrer intrépide cavalier, et mériter un coup d’œil d’une si belle reine. Elle verra peu de chasses au faucon dans l’endroit où elle repose maintenant ! Oui, oui, la pompe et les plaisirs passent aussi rapidement que le coup d’aile d’un noble oiseau.

— Et où donc est confinée maintenant cette pauvre reine ? » demanda Roland, prenant intérêt au sort d’une femme dont la beauté et les grâces avaient produit une si forte impression, même sur l’esprit grossier et insouciant d’Adam Woodcock.

— Où elle est emprisonnée ? dit Adam ; mais… dans quelque château du nord, dit-on. Quant à moi, je ne sais pas où : et à quoi sert de se tourmenter pour ce qu’on ne peut empêcher ? Si elle avait bien employé son pouvoir, elle ne serait pas tombée dans une si grande infortune. On dit qu’il faut qu’elle abandonne sa couronne à ce bambin de prince, car on ne veut pas la lui confier plus long-temps. Notre maître a été aussi occupé que ses voisins dans cette affaire. Si la reine rentrait dans ses domaines, le château d’Avenel pourrait bien fumer pour cela, à moins que notre maître ne fît son marché pour le mieux.

— La reine Marie enfermée dans un des châteaux du Nord ! dit le page.

— Dame, oui, du moins à ce qu’on dit. Dans un château situé au-delà de cette grande rivière que vous voyez là-bas. Du moins cela vous a l’air d’une rivière ; mais c’est un bras de mer, et l’eau en est aussi amère que de la saumure.

— Et parmi tous ses sujets, » s’écria Roland avec émotion, n’en est-il pas un qui ose risquer quelque chose pour sa délivrance ?

— C’est une question délicate, et si vous la faites souvent, maître Roland, je puis vous dire que vous serez vous-même cloîtré dans un de ces châteaux, à moins qu’on ne préfère vous tordre le cou pour s’épargner tout autre embarras de votre part. Risquer quelque chose ! Eh, mon Dieu ! Murray a maintenant le vent en poupe, mon ami, et il vole si haut, que l’aile d’aucun de ses rivaux ne peut l’atteindre. Non, non, c’est là qu’elle est, et c’est là qu’elle restera, jusqu’à ce que le ciel lui envoie sa délivrance, ou que