Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/217

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accompli, je vous en donne ma parole de chevalier et de prince, vous verrez s’ouvrir devant vous une carrière digne de satisfaire les désirs ambitieux d’un homme à qui sa naissance donnerait le droit d’avoir les vues les plus hautes. Je vous prendrai dans ma maison et près de ma personne, ou, d’après votre choix, je vous donnerai le commandement d’une compagnie de ma garde. D’un côté comme de l’autre, c’est un avancement que le plus fier des lairds du pays serait enchanté d’assurer à son second fils.

— Oserai-je vous demander, milord, » dit Roland remarquant que le comte attendait une réponse, « à qui mes humbles services sont destinés ? »

— On vous le dira ensuite, » répondit Murray ; puis paraissant chercher à vaincre une répugnance secrète à s’expliquer davantage, il ajouta : « Au surplus, pourquoi ne vous dirais-je pas moi-même que vous allez entrer au service d’une très-illustre… d’une très-malheureuse dame… de Marie d’Écosse ?

— De la reine, milord ! » s’écria le page, incapable de cacher plus long-temps sa surprise.

« De celle qui fut la reine, » répondit Murray d’un ton de voix qui offrait un singulier mélange de mécontentement et d’embarras. Vous devez savoir, jeune homme, que son fils règne à sa place. »

Et il soupira avec une émotion qui était peut-être en partie naturelle et en partie affectée.

« Et dois-je servir Sa Grâce dans la prison où elle est renfermée ? milord, » demanda encore le page avec une simplicité franche et hardie qui déconcerta le politique rusé et puissant.

— Elle n’est point en prison, » répondit Murray avec aigreur : « à Dieu ne plaise qu’elle y soit ! Elle est seulement éloignée du gouvernement et des affaires publiques, jusqu’à ce que le royaume soit suffisamment consolidé, afin qu’elle puisse jouir sans empêchement de sa liberté naturelle, et sans que ses intentions royales puissent servir de prétexte aux menées des méchants et des ambitieux. Pour ce motif, ajouta-t-il, comme il faut lui procurer une suite convenable à son état de retraite actuelle, il devient nécessaire que je puisse avoir confiance dans les personnes qui l’entourent. Vous voyez donc que vous êtes appelé à occuper une place très-honorable en elle-même, et dont vous pourrez remplir les fonctions de manière à vous faire un ami du régent d’Écosse. Vous êtes, on me l’a dit, un jeune homme singulièrement pénétrant ; et je m’aperçois par votre regard que vous comprenez déjà